Par Ludovic Galtier Lloret Journaliste
Né en Isère entre le tirage de la première boule noire de l'histoire de "Motus" - "Oh-ohohohoh" - et la première visite de candidats à "Fort Boyard", Ludovic Galtier est journaliste à Puremédias depuis octobre 2021. Il est passionné par la politique, l'économie des médias et leur stratégie de programmation.
Le domicile d'Ariane Lavrilleux, placée en garde à vue mardi 19 septembre 2023, a été perquisitionné dans le cadre d'une enquête ouverte par la DGSI. Elle avait révélé deux ans plus tôt dans "Complément d'enquête" et "Disclose" le rôle qu'aurait joué la France dans l'assassinat de civils commis par l'armée égyptienne.

Après 39 heures de garde à vue – "39 heures de trop !", dixit Reporters sans frontières – la journaliste d'investigation Ariane Lavrilleux est ressortie libre du commissariat central de Marseille en fin de soirée ce mercredi 20 septembre 2023. La veille, elle a été mise en examen dans le cadre d'une enquête ouverte sur cinq de ses investigations réalisées pour "Disclose" et "Complément d'enquête", relatives aux "ventes d'armes françaises à l'étranger" et aux "dérives" de l'opération "Sirli" en Égypte.

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"Merci beaucoup pour votre soutien"

"Je suis libre, merci beaucoup pour votre soutien", a écrit Ariane Lavrilleux sur X et en trois langues. Son message était accompagné d'une photo d'elle le poing levé devant un drapeau égyptien. La journaliste participera à une conférence de presse, organisée par Reporters sans frontières ce jeudi 21 septembre 2023 à 15h à Paris.

En novembre 2021, "Disclose" avait affirmé dans un article que la mission de renseignement française "Sirli", entamée en février 2016 au profit de l'Égypte au nom de la lutte antiterroriste, avait été détournée par l'État égyptien "au profit d'une campagne d'exécutions arbitraires". "Des crimes d'État dont François Hollande et Emmanuel Macron ont été constamment informés. Sans jamais en tirer les conséquences". Le ministère français des Armées avait porté plainte pour "violation du secret de la Défense nationale".

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Dans le cadre d'une mobilisation de soutien couverte par le média "Off investigation", Magali Serre, présidente de "Disclose", s'est exprimée, depuis la place de la République à Paris, quelques heures avant la libération d'Ariane Lavrilleux : "Ils (les policiers de la Direction générale de sécurité intérieure, ndlr) ont passé dix heures dans son petit appartement marseillais. Ils ont tout fouillé, tout retourné. Ils ont saisi un maximum d'éléments pour essayer d'identifier les sources de 'Disclose'. Très clairement, ils cherchent à identifier les sources. Pendant ces dix heures, Ariane était sans avocat. Des policiers de la DGSI ont tout fait pour la faire craquer mais elle a gardé le silence", a-t-elle relaté.

Avant de poursuivre : "Hier après-midi, elle a finalement été transférée au commissariat central de Marseille. Elle a pu avoir accès à notre avocat pendant trente minutes et elle a finalement chassé la nuit en cellule. Cela a été très dur pour elle. Elle a eu froid, a mal dormi. Plus les heures passent, plus elle est fatiguée", rapportait Magali Serre.

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"C'est arrivé deux fois ces quinze dernières années"

"Ce qui arrive à Ariane, c'est une privation inadmissible de sa liberté au travers d'une procédure extrêmement rare. C'est arrivé deux fois ces quinze dernières années. Le précédent, c'est notre confrère Alex Jordanov", s'est-elle remémorée. Auteur du livre-enquête "Les guerres de l'ombre de la DGSI", édité par Nouveau monde éditions en avril 2019, le journaliste d'investigation a été placé en garde à vue – et son domicile perquisitionné – le 22 juin 2019.

Mise à jour vendredi 22 septembre 2023 à 10h10 : Placé en garde à vue en même temps qu'Ariane Lavrilleux, un ancien militaire, soupçonné d'être l'une de ses sources, a été mis en examen pour détournement et divulgation du secret défense. Une infraction passible de 7 ans de prison.